Pierre LAMBY (1932-2012) Peintures

Vendredi, 25 Septembre, 2015 - Samedi, 17 Octobre, 2015
Jeudi, 24 Septembre, 2015 - 18:30 - 21:30

L'oeuvre de l'Artiste-peintre et architecte Pierre Lamby (1932-2012) fut présentée une première fois à la Galerie de Jean-Philippe Braam en 2013.Les différentes contributions au catalogue édité à cette occasion mettent bien en lumière les caractéristiques de son parcours, conjuguant architecture et peinture. Dès les années cinquante il consacre plusieurs années comme jeune architecte  à la reconstruction du village de Peyresq dans les Alpes de Haute-Provence.

Evoquant le peintre dans l'introduction dudit cataloque, Philippe-Roberts-Jones, Conservateur en chef honoraire des Musées Royaux des Beaux-Arts, met en exergue « son savoir-faire, sa sensibilité et son expressivité » et ce, « dans une oeuvre conçue dans le silence et le retrait ».

Le visiteur de la Galerie Braam constatera que les tableaux aux cimaises constituent autant d'exemples d'une peinture caractéristique de la période d'après-guerre s'inscrivant dans le droit fil de l' histoire de la peinture « moderne » de l'époque. Que l'on pense notamment à « la Jeune Peinture », belge ou française..

La peinture de Lamby est dans un premier temps proche à la fois d'une abstraction « chaude », courant à l'époque porté par le critique français Charles Estienne, et d' une forme de réalisme référencé à la nature environnante. Dans un deuxième temps, cette manière sera marquée par des accents plus matiéristes, comme chez son ami René Guiette.

Jean Bazaine, dans ses « Notes sur la peinture d'aujourd'hui »( Seuil, 1953) conteste la radicalité conceptuelle d'une peinture qui se voudrait « purement et simplement abstraite » (« qui s'inscrirait en marge de toute influence extérieure »).

A propos de l' «art non-figuratif », il écrit: «La tentation de faire surgir de soi, informes pour le monde, bouleversants, les signes mêmes, les cicatrices de ses plus secrets mouvements intérieurs, c'est la raison d'être du peintre depuis que la peinture existe. Mais il ne peut s'agir de rejeter des formes (mais des combinaisons de formes) provenant de la nature, puisque les formes du tableau, si peu figuratives soient-elles, il faut bien, même passant à travers nous, sortant de nous, qu'elles viennent de quelque part ».

Vincent Van Gogh avait déjà écrit dans une lettre à son frère Théo : « Je ne connais pas de meilleure définition du mot art que celle-ci : l'art c'est l'homme ajouté à la nature» (« Lettres », Grasset, 1937).

Pierre Lamby personnalise parfaitement ce que Philippe Roberts-Jones qualifie déjà en 1960 du « grand événement ...de l'art contemporain ». Il prenait la parole pour la leçon inaugurale au cours d'Histoire de l'Art à l'U.L.B. (Revue de l'U.L.B, Année XII n°5, août- septembre 1960) : « C'est la mise en évidence de l'humain (...) et sans nul doute (...) placer l'homme au premier plan de ses préoccupations et non plus le sujet. Et lorsqu'on dit l'homme, il faut entendre l'être vivant qui sent et agit, et non l'homme dans sa seule réalité anatomique de modèle ».

 

Michel Van Lierde     Septembre 2015

 

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Remettre en valeur les grands artistes restés dans l’ombre, tel est l’esprit qui anime la GALERIE JEAN-PHILIPPE BRAAM.

Des artistes dont la modestie a laissé leur création éloignée de l’attention d’un public souvent plus avide de sensationnel et davantage attentif aux effets de mode qu’aux véritable talents.

Pierre Lamby est de ces artistes confidentiels, qui ont laissé une œuvre picturale majeure, oubliée parfois, car élaborée dans l’ombre et le secret.

Dans l’ombre… et pourtant Pierre Lamby n’était pas à proprement parler un homme de l’ombre… ne confiait-il pas à son cahier de notes ce goût qu’il avait durant ses recherches impressionnistes de travailler face au soleil le plus aveuglant pour étudier les contre-jours ..

Lamby apparaît de fait comme un homme de contre-jour. Il a deux vies et plusieurs dons

Il était architecte et son talent ne faisait pas de doute, ses dessins d’architecture contribuèrent à l’édification du Musée d’Art Moderne,à celle de la tour RTBF…il était alors plus que renommé.

Son autre vie fut la peinture mais peu de gens y auront accès.

Et puis surtout il aura un lieu, un lieu d’élection, un espace particulier.

Le village de Peyresq un village du 13e siècle, qu’il va découvrir et aimer comme on aime avec passion , il a trouvé là le lieu où il accomplira l’œuvre de sa vie.

Il va édifier ce village, en remonter les ruines, en connaître chaque caillou par cœur, il y a créé un lieu de réunion, de colloques, y a apporté son souffle créateur.

Il a donc plusieurs facettes, son travail remarquable d’architecte et puis la mise en lumière de Peyresq son lieu d’élection.

Mais en filigrane de ces deux pôles il construit son œuvre picturale dans l‘ombre et le secret et ce sont ces trésors insoupçonnés qui nous sont dévoilés ce mois-ci aux cimaises de la Braam Art Gallery.

Les tableaux de Lamby sont principalement composés de techniques mixtes, des papiers, du vernis, de la cire, si l’on veut qualifier l’œuvre on parlera d’abstraction figurative., ou mieux d’expressionnisme abstrait.

Il semble toutefois que cette œuvre soit sans âge, et si particulière, Lamby y a déposé toute sa libre sensibilité.

Il opte d’emblée pour la couleur qui se libère de la représentation, elle devient une valeur à part entière, ses ocres, ses terres de sienne, respirent leur vie, associées à des formes et des lignes, elles s’envolent créant ainsi un langage visuel bien particulier.

La sensibilité du peintre éclate au grand jour et s’envole, en ce terrain bien préparé par Lamby qui n’oublie pas qu’il est architecte et dont la rigueur et le sens de la construction restent bien présents même aux moments les plus irraisonnés de son travail quand il est emporté par une liberté créatrice évidente.

Comme si l’homme de la terre dominait l’œuvre, on l’imagine édifiant son village, architecte d’abord, maniant des blocs de matières brut et les transposant dans ses toiles, comme on transpose le réel au rêve.

On songe à l’art de Lascaux, il y a des traces, des empreintes, des fossiles.

Certaines créations toutes en lignes et couleurs appellent au son, on entendrait presque une musique rien qu’en les regardant et je ne m’étonnerai pas d’apprendre que l’artiste possédait aussi ce don-là.

L’exposition réserve bien d’autres surprises de choix, il est temps de découvrir l’œuvre de Pierre Lamby si discrète et pourtant si parfaitement solaire.

 

Anne-Michèle Hamesse,  in Revue Générale